Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

La lecture dépend de beaucoup d’éléments : du support utilisé (tablettes, livres, écran), du lieu, de l’objectif, pour quoi lit-on, du lecteur lui-même qui va percevoir le texte à travers ses filtres personnels : sa culture, son environnement, ses valeurs, ses attentes, etc. 

J’aimerais vous proposer un survol de la lecture et du livre à travers l’Histoire. 

lecture grecqueDans la Grèce Antique,  l’écriture est au service de la culture orale : l’écriture était  sans séparation entre les mots et la lecture à haute voix permettait de faciliter la compréhension du texte par le lecteur. A cette époque, la lecture et le livre ont surtout une fonction de conservation des textes et de la mémoire. C’est vers la fin du Ve siècle avant JC que le livre, destiné à la lecture et plus seulement à la conservation, semble faire son apparition. La lecture est avant tout une pratique en société, la lecture solitaire telle que nous la connaissons étant a priori plus rare.

Peu à peu, la chose écrite s’impose et vient l’idée qu’il n’y a d’œuvre qu’écrite et qu’on peut se l’approprier grâce au livre. C’est l’époque des grandes bibliothèques telle que celle d’Alexandrie, qui représentent un instrument de travail pour les savants et les lettrés. Le texte déposé sur un support permet sa structuration en rouleaux (papyrus), la règle étant de consacrer un rouleau par œuvre. L’écriture est elle-même mise en colonne, avec des titres et des divisions dans le texte. 

A Rome, l’usage du livre s’étend, à partir des IIIe et Ier siècles marqués par un grand progrès de l’alphabétisation et une énorme production écrite : livres, poèmes, banderoles lors des cortèges, graffitis, brochures, calendriers, lettres, textes administratifs et juridiques. Les bibliothèques publiques font leur apparition et les bibliothèques privées se développent. Les femmes accèdent à l’écrit et à la lecture. 

A partir du Ier siècle, le livre avec des pages fait son apparition, remplaçant peu à peu les rouleaux. C’est le format privilégié des textes chrétiens et de leurs lecteurs.  

Ursins et copistes 15eAu début du Moyen-Age, les deux empires, occidental et byzantin, divergent sur la pratique de la lecture. Le livre conserve sa place dominante dans l’empire byzantin et l’enseignement privé ou public, élémentaire ou supérieur, reste en place. L’alphabétisation est une exigence de la société d’alors et la pratique antique de la lecture à haute voix se maintient. En Occident latin, la lecture devient silencieuse ou murmurée, dans les églises, les cellules monastiques. Elle se limite presque à la lecture des Ecritures et de fait les textes fleurissent en particulier dans les lieux ecclésiastiques. Le texte écrit et le livre deviennent des symboles du sacré : ils sont surtout lus pour connaître Dieu ou sauver son âme. La pratique de la lecture se raréfie.

Entre le XIe et le XIVe siècle,  les villes se développent et avec elles les écoles, lieux du livre. L’alphabétisation et la pratique de l’écrit progressent de concert et ne sont plus systématiquement enseignées séparément. 

Après l’organisation du livre au début de notre ère, c’est au tour de la page de se structurer en deux colonnes étroites afin que chacune puisse entrer dans un unique champ visuel. Le livre devient un outil intellectuel. Outre les livres en latin, cette période voit  l’apparition du livre en langue vulgaire, destiné à une bourgeoisie de marchands et d’artisans. 

imprimeurs 17eLe XVIe siècle est le siècle de l’imprimerie qui favorisera la circulation des textes : à moindre coût, avec une reproduction à l’identique des textes. Différents formats sont mis en place : le livre d’étude qui doit être posé pour être lu, le livre humaniste, plus maniable et plus petit, enfin le livre portable ou de poche. 

Au XVIIIe siècle, pendant Les Lumières, une fureur de lire s’empare des lecteurs. Ceux-ci consomment avidement et rapidement tous les imprimés possibles. La lecture silencieuse, respectueuse du texte, révérencieuse parfois, cède la place à une lecture libre, plus désinvolte et critique. La production du livre est multipliée par quatre à la fin du siècle. 

Pendant les XVIIIe et XIXe siècles, on voit se développer le roman dont les lecteurs occidentaux s’emparent. Ceux-ci s’identifient aux personnages et projettent leur vie dans les fictions qu’ils lisent. On peut évoquer ici la parution, en Allemagne, de l'oeuvre de Goethe "Les souffrances du jeune Werther" qui provoqua, dit-on, une vague de suicides, copiant ainsi la fin tragique du héros. On pense également à Emma Bovary, personnage de Flaubert, qui rêve sa vie à travers les fictions qu’elle lit, d’où le drame auquel elle et son époux seront confrontés. 

Le XXe siècle incarne un nouveau tournant pour le livre et pour la pratique de la lecture avec l’émergence de l’informatique et des nouvelles technologies.  metiers informaticiens computing64 gif

Lire sur un écran n’est pas lire dans un livre, le lieu du texte écrit est aujourd’hui souvent différent du lieu du lecteur. La relation entre le lecteur et le texte évolue encore puisque maintenant le lecteur peut participer à l’élaboration du texte, peut le découper, le refaçonner, l'annoter, le copier à l’envi et constituer un nouveau texte. Cette nouvelle relation aux textes fait également évoluer les concepts juridiques ou réglementaires (droits d’auteur, copyrights, intégrité du texte, originalité, etc.). 

De nouvelles manières de lire émergent, aussi radicales que fut le passage du discours oral à la conservation de l'écrit.

 

Marie-Laure Tena – 2 juin 2010

 

Source : Bibliothèque de France

 

Tag(s) : #histoire de la lecture, #lecture, #livres, #culture générale, #écriture
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :